Une crise sanitaire (Covid-19) peut en cacher une autre (pollution de l’air)

Une crise sanitaire (Covid-19) peut en cacher une autre (pollution de l’air)

Tirs croisés de plusieurs institutions françaises et européennes en 2020, contre la pollution de l’air en France, qui, selon les données publiées par l’Agence européenne de l’environnement (AEE), est due à trois principaux polluants (particules fines, dioxyde d’azote et ozone) ; elle est considérée comme l’un des “principaux facteurs de nocivité pour la santé humaine“.

Troisième cause de mortalité prématurée en France avec près de 48 000 décès annuels (uniquement pour les 3 polluants précités), derrière le tabac (80 000 décès par an) et l’alcool (49 000 décès par an), la pollution a bien entendu un coût économique et financier ; selon l’Alliance Européenne de Santé Publique, ce montant est d’environ 1 000 euros par habitant en France (1 602 euros/habitant pour la ville de Paris, et 728 euros/habitant pour la ville de Bordeaux).

Un changement de braquet du Conseil d’Etat sur la qualité de l’air

En juillet 2020, le Conseil d’Etat a opéré un changement de braquet concernant la qualité de l’air ; la haute juridiction administrative sanctionne désormais l’inaction de l’Etat face aux dépassements importants et persistants des valeurs limites en matière de pollution de l’air.

En effet, après une première décision en date du 12 juillet 2017, le Conseil d’État constate, dans un nouvel arrêt du 10 juillet 2020, que le Gouvernement n’a toujours pas pris les mesures demandées pour réduire la pollution de l’air dans 8 zones en France. Pour l’y contraindre, il prononce une astreinte de 10 millions d’euros par semestre de retard, soit le montant le plus élevé qui ait jamais été imposé pour contraindre l’Etat à exécuter une décision prise par le juge administratif.

Un constat d’inexécution ou d’insuffisance des mesures prises pat l’Etat

Saisi par plusieurs associations de défense de l’environnement au motif que le Gouvernement n’avait pas mis en œuvre les mesures nécessaires, le Conseil d’Etat constate d’abord que les valeurs limites de pollution restent dépassées dans 9 zones en 2019 ; qu’ensuite les « feuilles de route » élaborées par le Gouvernement pour les autres zones ne comportent ni estimation de l’amélioration de la qualité de l’air attendue, ni précision sur les délais de réalisation de ces objectifs ; qu’enfin, s’agissant de l’Ile-de-France, il est relevé que si le plan élaboré en 2018 comporte un ensemble de mesures crédibles, la date de 2025 qu’il retient pour assurer le respect des valeurs limites est, eu égard aux justifications apportées par le Gouvernement, trop éloignée dans le temps pour pouvoir être regardée comme assurant une correcte exécution de la décision précitée du 12 juillet 2017.

La sanction de l’inexécution : une astreinte de 10 millions d’euros

Par suite, “afin d’assurer sur l’État une contrainte suffisante“, le Conseil d’État a décidé de lui infliger une astreinte si celui-ci ne justifie pas avoir pris d’ici six mois les mesures demandées. Il a fixé cette astreinte à 10 millions d’euros par semestre, soit plus de 54.000 euros par jour, “compte tenu du délai écoulé depuis sa première décision, de l’importance du respect du droit de l’Union européenne, de la gravité des conséquences en matière de santé publique et de l’urgence particulière qui en résulte“. Le montant de l’astreinte pourra en outre être révisé par la suite, “y compris à la hausse“, si la décision de 2017 n’a toujours pas été pleinement exécutée, a précisé la haute juridiction.

Pour la première fois, le Conseil d’Etat a aussi jugé que si l’État ne prenait pas les mesures nécessaires dans le délai imparti, cette somme pourrait être versée non seulement aux associations requérantes mais aussi “à des personnes publiques disposant d’une autonomie suffisante à l’égard de l’État et dont les missions sont en rapport avec la qualité de l’air ou à des personnes privées à but non lucratif menant des actions d’intérêt général dans ce domaine“.

Une nouvelle enquête de la Cour des Comptes

La Cour des Comptes, dans un rapport de septembre 2020a réalisé une enquête sur les politiques de lutte contre la pollution de l’air. Alors que les risques sanitaires et environnementaux liés à la pollution de l’air sont de mieux en mieux connus, les résultats obtenus apparaissent encore manifestement insuffisants.  La Cour des comptes recommande désormais de mettre en œuvre des outils réglementaires ou fiscaux ciblés sur les risques identifiés dans les principaux secteurs émetteurs, notamment pour les transports, sur les émissions de dioxyde d’azote des moteurs diesel et les retards pris dans la limitation du trafic dans les zones urbaines denses.

Des procédures récurrentes devant la Cour de justice de l’Union Européenne

Le 30 octobre 2020, le contentieux opposant Bruxelles et Paris sur le dossier de la qualité de l’air a connu un nouvel épisode. Cette fois, la Commission européenne a décidé de saisir la Cour de justice de l’Union européenne d’un recours contre la France “relatif à la mauvaise qualité de l’air due à des niveaux élevés de particules fines (PM10)“et « non-respect de son obligation de protection des citoyens contre la mauvaise qualité de l’air“.

L’exécutif européen avait déjà renvoyé la France devant la justice en 2018 pour le non-respect des valeurs limites de dioxyde d’azote (NO2), un polluant dû pour l’essentiel aux émissions du trafic routier, dans douze zones de qualité de l’air. Dans son arrêt du 24 octobre 2019, la justice européenne avait reconnu le dépassement “systématique” de ce seuil, ouvrant la voie, dans un deuxième temps, à d’éventuelles sanctions.

Jean Pébayle

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