Plan vélo métropolitain 2021 – L’avis de Vélo-Cité
Le plan vélo de la métropole : “un plan d’actions pour faciliter la pratique du vélo” à horizon 2030
Rappel du contexte
Ce plan vélo est le 3éme du genre, si le premier (2012) fut un échec partiel faute de financement, le second offrait quelques promesses mais là encore nous avons vu que beaucoup de bonnes idées ont été dévoyées et que nombre de projets sont restés inaboutis.
Rappelons que l’objectif était d’obtenir une part modale du vélo de 15% en 2020 dans l’ensemble de la métropole, or nous sommes aujourd’hui à 8 % seulement. Il paraît (enquête IFOP de février 2021) que 14% des métropolitains utilisent leur vélo tous les jours ou presque… Un chiffre étonnant d’après ce que nous observons sitôt que nous nous éloignons de Bordeaux centre.
L’apparition du Corona virus en 2020 a largement mis en avant l’intérêt de la bicyclette pour les déplacements de courtes distances, appuyée en cela par le développement des vélos à assistance électrique.
Les collectivités ont assez largement « joué le jeu » en aménageant en un temps record (quand on veut on peut !) des couloirs bus, des bandes cyclables élargies, des doubles sens cyclables, etc. Et cela a fonctionné puisque nous avons vu effectivement croître le nombre de cyclistes dans des zones qui étaient jusque là peut fréquentées. Regrettons au passage que certains de ces aménagements aient été rapidement supprimés dans certaines communes.
Cela démontre bien l’importance de l’investissement dans des aménagements de qualité qui permettent aux usagers de se sentir en sécurité et de se déplacer rapidement.
L’élaboration d’un nouveau plan vélo
Nous ne reviendrons pas sur la démarche de co-construction de ce plan, celle-ci étant largement détaillée dans les documents métropolitains, si ce n’est pour souligner l’investissement de Vélo-Cité dans ce processus.
C’est ainsi l’occasion de remercier toutes celles et tout ceux qui ont apportés idées et compétences que ce soit dans les ateliers, les diverses réunions, les documents élaborés ou les projets spécifiques portés par notre association comme le « Plaidoyer pour une Métropole Cyclable » que nous portons depuis 2019 et que nous avons fait « approuver » par un nombre important de candidats aux dernières élections municipales.
Il n ‘est pas inutile d’en rappeler les grandes lignes qui tiennent en 5 propositions à réaliser d’ici 2026 :
- un réseau cyclable à haut niveau de service
- un parc circulaire sur les boulevards
- une métropole intermodale
- des villes et centres ville actifs, apaisés, attractifs
- faire émerger une « génération vélo ».
Nous pouvons nous attarder sur celui-ci pour constater que le projet du réseau vélo express dit ReVE (à voir ci-dessus) présenté par la Métropole reprend en large partie celui que nous avions élaboré et présenté dans notre plaidoyer (ci-dessous), qu’il s’agisse de son tracé ou des standards d’aménagements qui manquaient tant dans le précédent projet de réseau express.
Réaliser ses ambitions …
L’objectif ici n’est pas d’entrer dans le détail des différents axes et actions figurant dans le document métropolitains. Nous les approuvons largement. Et nous espérons surtout qu’ils seront menés à terme.
Car nous le constatons régulièrement, des projets ambitieux sont trop souvent révisés à la baisse pour un tas de bonnes raisons : difficultés techniques, coût de réalisation, changement de politique… Et aussi la méconnaissance des bonnes pratiques par les concepteurs et la mise en œuvre avec des compétences limitées par les entreprises réalisatrices.
Cette difficulté à réaliser des aménagements adaptés et agréables tant pour les cyclistes que pour les piétons n’est pas spécifique à Bordeaux, c’est un problème national.
C’est pour cela que notre fédération, la FUB, a lancé un programme baptisé « Académie des Experts en Mobilité Active » (ADMA) qui vise à doter la France d’une réelle expertise en matière d’intégration des sujets vélos et piétons dans l’ensemble des politiques publiques et privées.
Nous enjoignons donc les collectivités et les entreprises de la métropole et de l’ensemble du département à s’intéresser de près à ces formations.
Dans le même ordre d’idée il est désormais indispensable, et cela est prévu, de faire évoluer le guide de conception des aménagements cyclables. Est-il admissible qu’aujourd’hui les aménagements disparaissent dans les carrefours qui sont les lieux les plus dangereux pour les cyclistes ?
C’est un exemple parmi d’autres : nous souhaitons que les nouveaux aménagements assurent une continuité visuelle des itinéraires cyclistes dans les carrefours.
La question du financement du ReVe
La délibération du conseil de Bordeaux Métropole du 25 novembre, précise :
A l’horizon 2030, le coût de réalisation du ReVE est estimé à 150M€. En attendant d’affiner ce coût au gré des études qui seront menées dans les prochains mois et années, et en se basant sur les études et travaux déjà inscrits aux Contrats de codéveloppement 2021-2023, une AP à hauteur de 70M€ sur 5 ans, sera proposée à l’occasion du vote du budget 2022.
Une AP, c’est une autorisation de programme; en application d’une règle de gestion pluriannuelle :
“les autorisations de programme constituent la limite supérieure des dépenses qui peuvent être engagées pour le financement des investissements. Elles demeurent valables, sans limitation de durée, jusqu’à ce qu’il soit procédé à leur annulation.
Elles peuvent être révisées”.
Ce qui va être important de vérifier et devra constituer un point de vigilance pour Vélo-Cité, c’est l’ouverture des crédits de paiement dans les différents budgets de la mandature.
La mention des 70 M€ et un indicateur intéressant mais nous l’accompagnons de toutes les réserves quand à sa portée réelle si l’ouverture des crédits de paiement ne sont pas effectués en temps et en heure pendant la mandature.
Nous publierons donc régulièrement un baromètre, actuellement en cours d’élaboration, du suivi de mise en œuvre du RCHNS (ou réseau ReVE).
S’emparer des plans métropolitains collectivement
Avoir des plans vélo et piétons métropolitain c’est très bien, cela permet d’obtenir de la cohérence sur l’ensemble du projet (éviter par exemple les aménagements qui s’arrêtent en limite de commune !).
Mais cela suffit-il ? Probablement pas.
Porter à la connaissance de ses administrés les différents choix effectués, les priorités, les actions concrètes relève d’un simple devoir démocratique. Il ne suffit pas en effet de construire des pistes ou d’aménager certains secteurs en concertation et avec l’appui de la métropole. Beaucoup d’actions peuvent et doivent aussi être menées par les Mairies : sensibilisation, information, formation, stationnement des vélos, lutte contre les stationnement dangereux de véhicules, vitesse. Concernant les piétons l’éventail est tout aussi large : désencombrement des trottoirs, remise en état, prise en compte des personnes à mobilité réduite, etc.
Nous souhaitons que chaque commune publient dorénavant ses plans locaux sur les même thèmes.
Aller de l’avant
Ne perdons pas de vue notre ambition de devenir une métropole cyclable de référence. Le déploiement d’un réseau cyclable à haut niveau de service est indispensable et une étape clé pour permettre le développement de la pratique du vélo. Mais nous devons également appuyer des projets innovants et permettant une réelle valorisation du vélo dans l’espace public. C’est pour aller dans ce sens et donc pour aller plus loin, que nous avons pensé une grande vélorue inter-quartiers dans Bordeaux :
Ce projet nous vous le présentons en détail sur notre site et vous invitons à le découvrir si ça n’est pas déjà le cas : https://velo-cite.org/pour-une-grande-velorue-bordelaise/.
Si ce type d’aménagement voit le jour dans Bordeaux, nul doute qu’il pourrait faire des émules dans le reste de la métropole. La vélorue, bien qu’elle soit un dispositif peu déployé en France, présente de nombreux avantages parmi lesquels la place faite aux cyclistes dans des rue qui habituellement favorisent les automobilistes. Un premier pas vers une ville aux cyclistes (mais aussi aux piétons). Une ville apaisée donc !
Sur le blog Isabelle et le vélo, un très bon article explique l’utilité d’un tel dispositif : https://www.isabelleetlevelo.fr/2020/09/14/les-velo-rues-un-dispositif-tres-utile-neglige-en-france/.
Ne pas sombrer dans l’autosatisfaction
Certes Bordeaux Métropole compte parmi les métropoles les plus cyclables en France : en 2017, la part modale du vélo était déjà de 8% à l’échelle métropolitaine et de 13% à l’échelle de Bordeaux.
Si Bordeaux se situe à la 6ème place des villes cyclables d’après le dernier classement de Copenagenize (2019) nous mesurons le chemin à parcourir pour atteindre les toutes premières places : Copenhague et Amsterdam frôlent ou dépassent les 50 %.
Rappelons aussi que les allemands sont 26 % à utiliser le vélo pour leur trajet domicile-travail de moins de 5 km, contre 5% des français seulement !
N’oublions pas que la gare centrale d’Amsterdam offre 10.000 places de stationnement vélo auprès de qui nos 720 emplacements de la gare Saint Jean (sécurisés et payants) font pâle figure.
En bref : si avoir une ville cyclable est l’objectif, encore faut-il que les habitants s’en rendent compte et deviennent pratiquants.
En conclusion
Si Vélo-Cité s’inscrit pleinement dans les grands axes de ce plan vélo, ce qui est la moindre des choses puisque nous avons largement participé à son élaboration, nous ne manqueront pas de dénoncer retards, dérives et autres embrouilles.
Vous pouvez compter sur nous pour être vigilants dans son application.